Au-delà du ski, quels sont les modèles de transition que les territoires de montagne mettent en œuvre ? Quels bouleversements et reconfigurations cela induit-il ?
Cette série d’articles propose de revenir sur l’accompagnement de neuf territoires pilotes par la Fabrique des transitions, dans le cadre du programme Avenir Montagnes Ingénierie (2022-2024) porté par l’ANCT sur les enjeux de transition des territoires de montagne.
À travers un parcours collectif, l’accompagnement vise à favoriser l’émergence de dynamiques de transition multi-acteurs en mobilisant quatre “Fantastiques” par territoire (un élu, un agent de collectivité, un agent de l’Etat et un acteur socio-économique) et en alliant apports de connaissance, diagnostic sensible, échanges entre pairs et aide au cadrage et à l’initialisation d’un projet pilote.
"Il y a quelque chose à faire autour de la reconstruction des idées reçues"
La communauté de communes Cœur de Chartreuse est située dans les départements de l'Isère et de la Savoie, en région Auvergne-Rhône-Alpes. Elle comprend 17 communes (7 en Isère et 10 en Savoie), s’étend sur environ 357 km2 et possède une population permanente de 17 103 habitants.
Le territoire est au cœur du massif de la Chartreuse et du Parc naturel régional. Il est bordé par deux grandes agglomérations : Grenoble et Chambéry. Doté d’un fort caractère montagneux et rural, il dispose d’un capital naturel et paysager de grande qualité. La présence du monastère de la Grande Chartreuse façonne l’identité locale.
Le territoire est confronté à des difficultés liées à ses stations de ski (trois domaines skiables alpins classés « petite station », un domaine skiable alpin classé « station moyenne » et trois sites nordiques) et aux impacts de la fréquentation touristique. Il est conduit à repenser son identité et son positionnement en cohérence avec les enjeux de transition.
Dans ce cadre, les acteurs de la communauté de communes ont choisi d’initier deux démarches à travers le projet pilote : la valorisation des patrimoines liés aux Chartreux sur un site qui associe le vallon du monastère et la vallée du Guiers mort, et la co-construction d’un nouveau modèle pour le domaine skiable de Saint-Pierre de Chartreuse / Le Planolet.
Comment mieux outiller les acteurs territoriaux sur les enjeux globaux des transitions - et notamment les élus pour les appuyer dans leurs arbitrages ? Pour les bénéficiaires de l’accompagnement, les apports de connaissance du tronc commun ont joué un rôle essentiel à cet endroit, qu’il s’agirait d’encore renforcer. Pour la collectivité, ces apports ont également nourri la rédaction de la feuille de route demandée par l’État dans le cadre de la planification écologique.
La phase d’acculturation aux enjeux du réchauffement climatique, l’approche sociologique de ces enjeux… J’ai trouvé ça opportun. Je pense qu’aujourd’hui nous avons besoin de continuer sur ce travail d’acculturation : il y a encore un besoin d’apporter de la matière au sein du territoire. Il y a quelque chose à faire autour de la déconstruction des idées reçues. — Emmanuel Heyrman, Responsable du service tourisme de la communauté de communes Cœur de Chartreuse et chef de projet Avenir Montagnes Ingénierie.
Les apports méthodologiques ont, eux aussi, facilité les coopérations entre les acteurs du territoire. Malgré un aspect rébarbatif et chronophage à première vue, le processus de cadrage du projet pilote, à travers une succession de trois notes à produire par le territoire, a finalement permis d’ouvrir des espaces d’échanges et de gagner du temps par la suite.
Quand on a vu [les notes] arriver, beaucoup se sont demandés dans quels travaux administratifs vous nous emmeniez. Et finalement toutes ces petites réunions, ça a soulevé tellement de questions et permis aux communes d’être vraiment en phase. J’ai trouvé ça très utile. Pour le coup, ça pourrait être réutilisé ailleurs. — Wilfried Tissot, maire de Saint Pierre et Vice-président chargé de l’agriculture, de l'environnement, des forêts et de la transition à la communauté de communes Cœur de Chartreuse.
Au niveau de la dynamique multi-acteurs suscitée par l’accompagnement dans le territoire, des liens d’interconnaissance et des habitudes de travail existaient déjà entre les agents des différentes collectivités et avec le parc naturel. En revanche, les espaces de gouvernance partagés gagneraient à être à la fois simplifiés et renforcés - ce à quoi le dispositif Avenir Montagnes Ingénierie et le projet pilote pourraient concourir.
De même, les représentants de l’État territorial étaient déjà impliqués dans la mise en œuvre des différents projets des collectivités lorsque nécessaire. S’ils pourraient être davantage mis à contribution également lors des phases de définition des projets en amont, l’accompagnement leur a permis de mieux connaître le territoire et d’ainsi renforcer leur appui à leur égard.
Les “4 Fantastiques”, j’en ai vraiment tiré profit. L’État a accompagné la communauté de communes pour demander une subvention exceptionnelle d’équilibre de fin d’année. Dans ce cas, j’ai pu argumenter sur le fait que le territoire est dans une vraie démarche de transition : on connaît mieux et on peut mieux argumenter. — Flore Evette, Chargé de mission ingénierie territoriale auprès du sous-préfet de l’arrondissement de Grenoble.
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